Intervention au conseil municipal du 14 décembre 2017
Monsieur le maire,
Vous nous proposez ce soir d’adopter la charte de la laïcité qui a été approuvée par la majorité de Mme Pécresse au conseil régional en mars dernier.
S’agit-il d’un heureux hasard ou d’une réponse à deux tribunes parues dans le dernier numéro du Sévrien ? Pour celle que j’ai signée et que j’assume totalement : oui, monsieur le Maire, j’ai été choquée par le fait que sans aucun débat au sein de ce conseil, sans aucune information, vous aviez décidé seul de l’organisation des messes dominicales au SEL, dans un bâtiment municipal jusqu’à présent dédié à des activités culturelles et non cultuelles. Jusqu’à ce soir, et parce que j’ai demandé communication de votre décision portant convention entre la ville, l’EPPC du SEL et la paroisse, nous n’avions aucune information sur les moyens publics mis à disposition pour le déroulement de ces messes. Vous avez fait le choix politique de reloger la messe du dimanche matin alors que rien ne vous y obligeait.
Beaucoup de Sévriens et de Sévriennes ont été comme moi choqués, dérangés par cette mise à disposition. Quelles que soient leur orientation religieuse d’ailleurs.
J’en reviens à la charte régionale qui est notre sujet pour l’instant. Vous nous dites dans le rapport de présentation qu’il est important, quelles que soient nos opinions, que nous réaffirmions notre accord avec les principes de la laïcité. Si nous nous en arrêtions là, je signerais des deux mains. Pourtant, vous savez que cette charte n’a été adoptée que par la majorité régionale (Les Républicains et les centristes) et qu’elle a fait l’objet d’un débat intense dans l’hémicycle régional.
Vous affirmez que l’Etat a validé cette charte : je ne sais pas quelle instance l’a fait. Je sais cependant que l’observatoire national de la laïcité, organisme rattaché au Premier Ministre, a produit un avis sur cette charte. Et que cet avis n’est pas un avis favorable parce que le texte régional n’est pas conforme à la définition de la laïcité.
La laïcité, pardon pour ce rappel, mais il éclaire notre débat je crois, ce sont trois principes et trois valeurs :
La liberté de conscience et celle de manifester ses convictions dans les limites du respect de l’ordre public, la séparation des institutions publiques et des organisations religieuses, et l’égalité de tous devant la loi quelles que soient leurs croyances ou leurs convictions.
Or la charte régionale ne s’appuie que sur le droit négatif généré par ces principes. Elle ne rappelle à aucun instant la liberté d’opinion religieuse, politique ou syndicale. Elle est pour le moins confuse lorsqu’elle rappelle le devoir de neutralité des services publics sans mentionner que ce devoir de neutralité ne s’applique pas aux usagers de ces services. La charte ne rappelle pas non plus que nul ne doit être discriminé du fait de ses opinions religieuses, politiques ou syndicales.
Le concept de laïcité ne peut pas être découpé en morceaux, soit on y adhère complètement, soit on n’y adhère pas. Or, la charte de Mme Pécresse est une réécriture orientée de la laïcité, et c’est pourquoi je ne la voterai pas.
Je ne la voterai pas non plus parce que je suis soucieuse d’un autre principe de notre constitution qui est celui de l’autonomie administrative des collectivités territoriales et qui garantit l’indépendance des collectivités territoriales les unes par rapport aux autres.
Rien n’oblige notre conseil municipal à adopter une charte régionale de la laïcité, sauf votre volonté politique, cher-es collègues de la majorité municipale, d’apporter votre soutien à Mme Pécresse.
La laïcité n’est pas une opinion, mais la liberté d’en avoir une.